Toi, moi… Pourquoi ? – Verbatim

Le Café Psy du 03.04.14

botero-danseurs goodLa rencontre

«  J’ai découvert que je tombais amoureux de l’image que l’autre me renvoyait, une image de moi tellement dingue que je tombais amoureux. »

« Je pense que je n’ai jamais été dans la phase où je voyais les ressemblances. Je ne voyais rien de pareil. »

« Si jamais il y a eu une phase d’idéalisation, je ne l’ai pas encore vue !»

« Quand on se rencontre à deux, en fait, il y a beaucoup de monde. Lui amenait un petit garçon en très grande souffrance et moi une petite fille en très grande souffrance. Ca a été une expérience extrêmement douloureuse. »

«Toi », « moi », ou « nous » ?

« J’ai été en couple pendant 17 ans. On a grandi ensemble mais on n’a pas pu continuer ce chemin ensemble. Si je m’étais plus aimée moi-même, j’aurai donné plus au couple et peut-être qu’on serait encore ensemble aujourd’hui. »

« Le couple, c’est la rencontre avec l’altérité. Cela implique qu’il y ait un « Je » en face. Ce sont fondamentalement deux personnes qui se rencontrent. Si je ne suis pas « Je », je ne peux pas rencontrer l’autre. »

« Est-ce que le  « Je » est au-dessus du « Nous » ? »

« Je suis mariée depuis 25 ans et pendant 24 ans, on n’a parlé uniquement en tant que « Nous ». Un travail thérapeutique m’a permis de me découvrir dans le « Je ». Cela a déstabilisé le couple. »

« Quand j’ai dit « Je », ça a déséquilibré le  « Nous ». »

« Une thérapeute de couple nous a demandé : « Est-ce que vous pouvez me résumer en trois mots ce qu’est l’autre ? ». J’ai répondu : « C’est l’homme de ma vie ». Mon mari a très mal réagi : « Je ne suis pas l’homme de ta vie, je suis ton mari ». »

« Quand les enfants ont commencé à s’envoler, notre projet commun s’est envolé avec eux. Aujourd’hui, notre couple, c’est deux « Je » affirmés. »

« Les « Je » sont très égoïstes. »

« Quand je dis « Je », je me trouve très égoïste. Mais quand on parlait dans le « Nous », il parlait à ma place. »

« A un moment donné je ne savais plus qui était moi, qui était l’autre. Je me perdais dans ce qu’était l’autre. Il a fallu que ça explose, et avec bonheur. Quand les couples se forment, les inconscients sont d’accord et quand ils se défont, les inconscients sont aussi d’accord. Cela a explosé pour quelque chose de positif, pour quelque chose de personnel. »

« J’ai dans l’idée que j’évolue de façon personnelle à travers le couple. »

1+1=2 ou 1+1=3 ?

« Pendant 25 ans, j’étais persuadée qu’on construisait notre couple ensemble mais lui, vraisemblablement pas. Je lui parlais de notre relation que je trouvais inexistante et lui, il parlait de lui. Moi, je voyais notre couple comme quelque chose au-dessus de nous mais lui se voyait lui avant le couple. Un couple, c’est deux entités plus le couple. Comment être sûre que, pour faire 3, les 1+1 soient toujours en phase ? »

« Comment évoluer ? Il faudrait que les 1+1 arrivent à faire 3 en même temps. »

« Que je veuille avancer, cela ne doit pas concerner mon couple mais seulement moi. C’est à moi de faire mon travail de mon côté. Je ne dois pas le faire peser sur l’autre. »

« Un couple, c’est d’abord l’affirmation de soi. Il se nourrit de l’affirmation de soi-même. Quand on rentre dans la négation de l’un ou de l’autre : le couple meurt. Il ne peut exister qu’avec deux identités très fortes qui se nourrissent l’une l’autre. »

«  Le couple m’aide à avancer, pas le partenaire, mais la relation.  »

L’amour

« L’amour au sens chrétien, c’est donner sans espérer recevoir. »

« La notion de couple n’a pas d’existence sans amour. En particulier sur la capacité à recevoir et à donner. »

« Aimer et avoir la capacité d’être aimé… Je pense avoir des difficultés à ce niveau-là. »

« Cette capacité à recevoir et à donner, c’est lié à l’inconscient. J’ai réalisé tard que mon conjoint répondait au besoin de la petite fille que j’ai été. Le couple nous ramène souvent à nos problématiques d’enfant. »

« Dans la tradition berbère, on rencontre la mère de la femme avant la femme, parce que « en regardant la mère, on connaît la femme ». »

« Je me rends compte que l’homme que j’ai épousé a des points communs avec ma mère. »

Le Café Psy : « Au départ, on s’aime nous dans l’autre, ou notre père dans l’autre, ou notre mère, etc. On commence à aimer vraiment l’autre quand on l’aime « aussi » pour ce qu’il est. »

« L’amour, ce n’est pas que du romanesque. »

« Les hommes avec qui j’ai eu une relation, quand on s’est séparé, j’ai continué de les aimer. L’amour nous fait vivant, nous fait vie. »

« L’essence de notre couple n’était pas l’amour mais la parentalité. Cela ne veut pas dire qu’il n’y avait pas d’amour mais ce n’était pas l’essence de notre couple. »

« J’ai l’impression de ne vivre que d’amour. Etre un couple amoureux, pour moi, c’est le mieux. Je suis ultra amoureux mais je crois que la plupart des couples que je connais ne le sont pas. »

Le Café Psy : « Dans l’état amoureux premier, on se dit souvent : « Je vis une sensation merveilleuse que personne n’a jamais vécue. » Mais il y a une différence entre l’état amoureux et l’amour. De l’état amoureux peut naitre l’amour. Ou pas. Cela nécessite un travail. C’est d’ailleurs quand l’état amoureux finit que le travail du couple commence. »

Construire

« Pour moi, couple et amour sont deux choses séparées. le couple, c’est l’apprentissage de la maturité : apprendre à être soi et à être à deux. »

«  La première fois que j’ai entendu le mot « couple », c’est mon compagnon de l’époque qui m’a dit : « faire un couple, c’est quelque chose ». J’avais 21 ans, j’étais très amoureuse et je n’avais jamais pensé qu’un couple, c’était quelque chose qui se construisait. »

 » Avec mon conjoint, depuis huit ans, on a appris à construire cet objet couple. Ça n’a pas été simple. Pour ce qui me concerne, c’est un objet très précieux, qu’il faut continuer à développer. Notre mariage au bout de sept ans a aussi été une étape dans cette construction. »

« Ce que je trouve très beau, c’est le chemin, c’est la marche. Y’a un passage dans Le Petit Prince, l’apprivoisement du renard : je vis ça comme ça. »

Angoisses

« Le couple est un aboutissement. Quand on est en couple et amoureux, on pourrait mourir ! C’est comme la vie : on connait la date de sa naissance, mais on ne connait pas la date de sa mort. On ne connait pas la fin parce que ça ne dépend pas que de nous. Ça m’angoisse. Je voudrais savoir. »

« Je me rends compte que mon angoisse du couple est certainement liée à celle de la vie et de la mort. »

« C’est un peu une folie pour moi le couple. C’est une folie dans laquelle rien n’est sûr. »

Le contrat implicite

« Sur les vingt ans que j’ai passé avec mon mari, on a échoué sur le couple homme /femme, mais on a réussi comme parents. »

«  J’ai quitté mon mari pour un homme qui m’a permis de retrouver ma féminité. En revanche ce n’est une histoire facile. Il y a de la violence, de l’agressivité et du conflit. Je ne sais pas où je vais. Je n’ai pas envie d’échouer et pourtant, lui comme moi, on met des choses en place pour que ça échoue. »

Le Café Psy : « Le contrat implicite change au fur et à mesure que l’on évolue en tant qu’individu. Les crises surviennent quand on n’évolue plus en même temps ou dans un sens compatible avec celui de l’autre. »

« Les deux construisent mais pas de la même manière. On ne peut jamais savoir si l’autre nous aime de la même manière que nous. »

« Les contrats implicites, je les imagine comme des mille-feuilles. Lui a le sien et moi le mien, des mille feuilles plein d’implicite. »

Le Café Psy : « L’important, c’est de tenter de rendre explicite le contrat implicite. »

Mise en danger et protection

« Il y a deux grands types de couples : ceux qui nous protègent de nous-même et ceux qui nous mettent en danger. Pour moi, le plus beau couple est celui qui nourrit et qui m’ouvre à ma part d’ombre, qui me permet d’aller l’examiner avec quelqu’un qui m’aime. Ce n’est pas facile mais c’est plus nourrissant. »

Le Café Psy : « On parle beaucoup de l’amour dans le couple, mais chez certains, l’amour n’est pas le fondement. Le couple peut servir à protéger d’une part noire, d’une part de folie même, parfois. Georges Lemaire, psychanalyste, auteur de Le Couple, sa vie, sa mort, raconte l’histoire d’un couple qui se déchirait depuis vingt ans. Leur entourage se demandait pourquoi ils ne se séparaient pas. Un peu comme Gabin et Signoret dans Le Chat. Quand l’homme est décédé, la femme a décompensé et s’est retrouvée internée en psychiatrie. La relation de haine la protégeait d’elle-même. »

« C’est important pour moi d‘avoir une écoute sur mes angoisses et ma part d’ombre. Le déni c’est quelque chose d’horrible. »

« Un vrai couple, ça me met en danger et ça me rassure. Je me rends compte que je préfère être en danger plutôt que rassuré. Cela m’est plus riche qu’une relation confortable, y compris dans mes zones d’ombre.»

« Toutes mes histoires de couple, toutes, m’ont appris quelque chose. J’ai appris de moi. Elles ne m’ont pas protégées de ma part d’ombre mais m’ont appris sur ma part d’ombre. J’ai aimé ces hommes pour ce qu’ils m’ont fait découvrir de moi. »

La sexualité

« Il n’y a pas de couple sans sexualité. »

« On rêve un truc parfait : sexe, amour, enfants…. Mais au fond, être avec quelqu’un, c’est une frustration. »

« L’aboutissement est aussi sexuel dans le couple quand, sexuellement, il y a une fusion totale. J’ai toujours l’impression qu’il n’y a que moi qui touche au truc, que dans mon couple le sexe est génial, et que les autres, ils ne baisent pas ! (rire) »

« Je n’ai aucun plaisir à avoir des relations sexuelles en dehors de mon couple. »

« C’est très judéo-chrétien de penser qu’on fait un couple pour avoir des enfants. »

« Quand on fait l’amour, on sait qu’on ne va pas procréer. Du coup cela pose notre sexualité à un autre endroit que la reproduction. »

« Une chrétienne a dit : « Dans l’acte sexuel, il y a recherche de la jouissance car jouir ça nous rapproche du vivant. » »

« Je ne suis pas sûr que le sexuel soit toujours le ciment du couple. Je conçois que dans certains couples la sexualité ne soit pas essentielle, voire même inexistante. »

« Chacun place dans le sexe l’enjeu et la valeur qu’il veut. Le sexe n’est pas juste la jonction de deux individus, mais le sens qu’on le sens qu’on lui donne. »

« Quand on fait moins l’amour, j’ai l’impression d’être moins aimé. Quand on me fait l’amour, j’ai l’impression qu’on me dit je t’aime. »

Une entité sociale

« Le couple, c’est aussi une représentation sociale de l’amour. Quand on lit l’horoscope il peut être écrit : en couple ou célibataire. »

« Le couple officiel, c’est celui qui est marié. Quand je me suis mariée, j’ai pris le nom de mon mari. J’ai perdu un bout de mon identité. »

« Il y a eu un moment de prise de conscience inattendu juste avant notre mariage : le passage chez le notaire. Avant de signer le contrat, le notaire nous a expliqué les différents contrats. Il avait une définition juridique du couple : « s’enrichir ensemble ». L’argent est un tabou et pourtant, la question se pose toujours à un moment. Finalement, j’ai été très reconnaissante envers ce notaire. »

« Le couple n’est né que parce que le code civil a régulé la transmission des biens. C’est très récent que le couple soit le produit de l’amour. Cela date de quelques dizaines d’années. Avant c’était le patrimoine, l’héritage… »

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *